À la rencontre des producteurs…
en Ligurie

Début mai, j’ai réussi à échapper à la pluie et à la grêle qui s’abattaient sur Paris en mettant le cap sur la Côte d’azur, direction la Ligurie, en Italie. Je suis allé rencontrer Pietro, un producteur d’eau de fleur d’oranger qui fait partie du mouvement Slow Food. J’étais curieux de le voir au travail, dans son quotidien.

Vallebona se trouve en Ligurie, une région d’Italie qui part de la frontière française et longe la côte. Je rejoins Pietro à la terrasse du petit café du village et après l’expresso obligatoire, j’embarque dans sa fiat panda rouge d’un autre siècle pour passer la journée avec lui dans les champs d’orangers. La route est sacrément pentue, avec de nombreux lacets en tête d’épingle. Après 10 minutes, la route se fait chemin, puis l’on gare la voiture devant la maison de sa grand-mère, le long d’un bassin d’eau de source. Le vieil alambic de l’arrière-grand-père a été conservé et trône dans la cour. Quant à ceux de son arrière-arrière-grand-père (autrement dit son trisaïeul), ils ont été descendus à Vallebona pour rejoindre la petite boutique-musée que Pietro est en train d’aménager.

Quelques années plus tôt, Pietro a décidé de reprendre le métier familial de production de fleur d’oranger. Même si ce savoir-faire traditionnel se transmet dans sa famille depuis 7 générations, c’est un sacré défi qu’il s’est lancé ! 

Cette région a longtemps été réputée pour sa culture des orangers. Rappelez-vous qu’on se trouve juste à côté de Grasse. Seulement, dans les années 1950 la production s’essouffle puis disparait avec l’arrivée des arômes synthétiques et l’augmentation de la production de fleur d’oranger en provenance de Tunisie et du Liban. En reprenant le flambeau, Pietro est le seul de la région et même d’Italie à faire revivre ce métier.

Il faut emprunter un petit sentier qui commence derrière la maison pour descendre dans le verger. Son orangeraie compte environ 280 arbres, sur deux parcelles. Certains arbres commencent à avoir un beau rendement, de nombreux autres, encore un peu trop jeunes, n’atteindront leur plein potentiel que dans quelques années. Si l’on parle communément de fleur d’oranger, rappelons qu’il s’agit de fleur de bigaradier (citrus aurantium), c’est-à-dire d’orange amère.

Nous sommes début mai et les arbres sont couverts de petites fleurs blanches. J’ai de la chance car aujourd’hui les conditions sont réunies pour pouvoir faire la cueillette : il fait beau et le vent ne souffle pas trop fort. Quand nous arrivons dans l’orangeraie, les parents de Pietro et son beau-père sont déjà affairés depuis longtemps. 

Seules les fleurs ouvertes doivent être cueillies. On ne touche pas aux boutons et il faudra attendre un prochain passage dans le verger dans 2 ou 3 jours pour leur laisser le temps d’éclore.

En fin de journée,  les fleurs sont apportées près de la maison, à l’abris du vent. Feuilles et branchages sont retirés. Après un temps de repos, les fleurs sont versées dans l’alambic.

La distillation se fait exclusivement à la vapeur d’eau (à 100°C). Elle passe à travers les pétales, transportant avec elle tous les composants aromatiques et les huiles essentielles. Un circuit de refroidissement permet à la vapeur de repasser au stade liquide et ainsi de récupérer l’eau de fleur d’oranger et le néroli (l’huile essentielle d’oranges amères). 

Il faut un kilo de fleurs pour produire un litre d’eau de fleur d’oranger, et une tonne de fleurs pour faire un litre de néroli !

Puisque la cueillette dans les vergers se fait en famille, voici pour finir quelques belles photos de Pietro, sa grand-mère et ses parents.